Régulièrement installé derrière son piano pareil à un chef en cuisine, Paul Prier n’a pourtant jamais fait un plat de son art. Alors, dans une célèbre brasserie spectatrice de ses préludes électro-pop avec le duo TOYS jusqu’au dernier de ses singles en solo, celui qu’on ne présentera désormais plus comme un classique musicien de scène s’est mis à table, rappelé par le menu l’histoire d’un talent dont il faut maintenant amplifier l’importance mais taché d’amères déconvenues, et a finalement donné la note en évoquant son goût tout particulier pour l’instrument à cordes frappées.
Contrecoup entendu des écoutes répétées de son premier EP, cette conversation avec Paul Prier touche donc un air de “Punctual Problems”, festin d’une finesse sans apparat – c’est-à-dire composé de morceaux simples, en apparence seulement, impeccablement arrangés, et qui comble un désir, un besoin d’ordre intellectuel, spirituel –, et parcourt surtout le clavier des sentiments, relations et autres voix intérieures qui secondent encore l’artiste afin qu’il apprécie pleinement toute la saveur du mérite.
Comme on épèle lettre après lettre un mot inconnu, Phoenix a dévoilé dans les règles de l’art, single après radio edit, son nouvel abécédaire de musique : Alpha Zulu. Avec son titre à la fois élémentaire et inaccessible, capté dans une zone de turbulences aériennes, son enregistrement, dans l’aile d’un musée, troublé mais renforcé par des interférences déroutantes, ce dernier album est précisément l’œuvre d’un groupe toujours attentif à percevoir tous les signes, accidentels, qui laisseraient finalement entendre sa définition.
Le guitariste Christian Mazzalai dit d’ailleurs faire sien l’ordre des choses au lieu de chercher à le modifier. Au même titre que les autres membres de Phoenix – Thomas Mars, Deck d’Arcy et Laurent Brancowitz –, mais aussi à la manière du penseur Zhuangzi qui fait vibrer d’autres cordes en lui : le travail de l’artisan appelle une expérience immédiate, instinctive, avec ce qui l’entoure, et ne saurait être interprété par quelque langage.
Pour Discotexte, le musicien parcourt néanmoins le caractère authentique de sa discographie pour mieux lire les thèmes de sa plus récente partition, déjà remarquée depuis presque un an et demi.
L’Impératrice allait finalement donner moins d’importance à des annonces parfois prophétiques et depuis devenues obsolètes qu’à des flashbacks intenses restés tout à fait inédits, à l’aube de leur première décennie…
Depuis son premier succès, GOOSE a toujours fait d’un nouvel enregistrement un point de départ, parfois de repère, jamais de retour. Pendant vingt ans, l’itinéraire discographique du quatuor électro-rock ainsi que le parcours plus personnel accompli par chacun de ses membres ont donc mis le groupe en mouvement dans un perpétuel (re)commencement.
Mais “Endless”, la dernière composition de GOOSE, poursuit une autre fin dans sa démarche même.
Cette fois, leurs expériences – aussi bien les connaissances acquises que l’étude des premiers pas – et les divers cheminements – de la caresse à la perfection d’un projet (album, carrière, relation) – dirigent le désir et le processus créateurs de Mickael Karkousse, David Martijn, Bert Libeert et Tom Coghe. Pareil à des notes de voyage, “Endless” témoigne de l’étendue de talents regroupés, de leur quartier général artistique à Courtrai, en Belgique, au légendaire Motorbass Studio du 18e arrondissement de Paris.
GOOSE, dont la destinée paraît désormais impossible à interrompre, aurait-il signé une œuvre majeure, à la jeunesse éternelle ?
En musique, l’échappée est une note mélodique, étrangère à l’accord qui la précède et la supporte mais entrant dans la composition de celui qui suit. Une sorte d’anticipation, donc, inhérente à la grammaire des sons de Gaspard Augé, plus qu’une dissonance itinérante, passagère, dans l’harmonie et l’œuvre de Justice.
Avec son premier album solo, le bien nommé Escapades, il jette aux oubliettes l’ensemble des règles et principes qui standardisent son art, s’évade et s’imagine un avenir parallèle au célèbre duo électro.
Sans unité ni limite de temps, depuis ses premiers pas au synthé jusqu’au grand saut allégorique vers son « indépendance », à travers les avatars d’une époque médiévale et les fabliaux d’une aventure spatiale, Gaspard Augé est revenu sur un parcours sans faute et mettre finalement Discotexte au diapason de son équipée inédite…
LAAKE est une antithèse. Ce rapprochement de deux idées opposées qui prennent ainsi plus de relief, Raphaël Beau en a fait la définition et toute la perspective de son projet, la signification même de son album électro-orchestral.
Sorti et largement diffusé pendant la première interdiction de déplacement des Français, “O” est une lettre ouverte aux grands espaces comme au for intérieur, sa déclaration à la musique (avec majuscule) qu’on écoute en silence, fasciné.
L’artiste, qui s’était jadis jeté dans le maar – ce cratère rempli d’eau – en autodidacte volcanique et pianiste aimant, a peut-être signé là l’œuvre la plus attractive d’une année dont on cherche déjà à repousser le mauvais souvenir. Qui oserait dire le contraire ? LAAKE n’a pas son pareil.