MARTIN SCORSESE
“SHINE A LIGHT”
Lumière sur les Stones
Martin Scorsese a fini par réaliser, mieux qu’un film, son rêve : Shine a Light, un documentaire sur les Rolling Stones. “La musique est pour moi aussi importante que le cinéma. Elle m’inspire constamment, elle imprègne mes images, mes mouvements d’appareil, mon montage. Je sais que, sans la musique, je serais perdu…”
En 1970, Martin Scorsese était assistant réalisateur et monteur sur le film Woodstock, 3 jours de musique et de paix, de Michael Wadleigh. De cette première expérience, il dira : « J’ai appris à organiser et contrôler une équipe de cameramen, mais nous n’avions pas de script. Nous ne savions pas à l’avance qui allait chanter quoi. C’était le chaos. » Près de vingt ans plus tard, l’ouverture de son « rockumentaire » Shine a Light nous fait croire que rien n’a changé : Martin Scorsese demande des caméras partout et un décor envahissant, au grand dam des Rolling Stones, qu’il fait jouer dans le petit Beacon Theater de New York, et Mick Jagger, ce grand monsieur, refuse sa set-list (encore incomplète) au cinéaste.
En fait, la rock attitude est restée la même.
Martin Scorsese, qui a toujours emprunté à l’œuvre des « Glimmer Twins » (le titre Gimme Shelter est la bande-son de Les Affranchis, Casino et Les Infiltrés), n’a d’ailleurs jamais abandonné l’idée de réaliser son rêve : filmer ses idoles. Trop tard ? Mick Jagger, Keith Richards et Charlie Watts tournent ensemble depuis 1962 – Ron Wood les a rejoints en 1974. Mais la prestation comme la prestance des sexagénaires gravent encore la pellicule et la légende, vivante, du rock : « J’ai simplement voulu restituer en sons et en images la formidable force dégagée sur scène par les Rolling Stones », assure Martin Scorsese.
Shine a Light met en scène les origines du groupe, réunissant des guests (le vieux Buddy Guy, la vigueur de Jack White et Christina Aguilera) pour convoquer le blues en live, et rassemblant quelques vidéos d’archives et d’interviews comme prédestinées à ce docu-concert filmé. Sous l’œil du cinéaste admirateur, les Rolling Stones sont des artistes de chair et de sang, toujours sublimés par le temps qui passe. Justement parce qu’il n’a pas de prise sur des pierres qui roulent…
SHINE A LIGHT, DE MARTIN SCORSESE (WILD SIDE VIDEO, 2008)
Mickaël Pagano