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BLUE HOPE DIAMOND
LUXE

Éclats

Son nom grec, « adamas » (« l’indomptable »), évoque surtout les extraordinaires propriétés de ce minéral. Les légendes qui lui sont liées sont même parfois prisonnières de sa découverte autant que de ses pouvoirs bienveillants… Pourtant, l’on croit plus volontiers à un maléfice lorsque le récit d’un diamant est aussi ceux, plus tragiques, de ses possesseurs, toujours malmenés par le sort…

La mémoire de ce diamant d’un bleu saphir débute en Inde, en 1662, où, dans la balance du négociant Jean-Baptiste Tavernier, ses 112 carats pèsent bien plus que son origine : dérobée à une statue de Shiva, la précieuse gemme causera les plus vils drames à qui s’en emparera.

Précédé par son obscure réputation, le brillant parvient tout de même en France six ans plus tard. Vendu à Louis XIV, le « Diamant de la couronne » est taillé en un cœur de 67 carats. Quelques palpitations animeront la vie de Tavernier avant que le mauvais œil divin ne lui donne finalement le baiser de la Mort : déchiré, dit-on, par les crocs acérés de chiens sauvages…

Plusieurs années s’éclipsent dans l’anonymat de la malédiction : après la mort du Roi Soleil, le Bien-Aimé Louis XV fait monter le joyau sur le collier de la Toison d’or dans une absence absolue de péripétie. C’est avec Louis XVI et Marie-Antoinette, légataires du « Bleu de France », que le diamant sonne le glas des souverains. Et tandis que raisonne encore la Révolution, le terrible ornement disparaît dans le vol des bijoux du garde-meuble national de 1792.

Londres révèle enfin les 44,5 carats d’un diamant bleu-gris sombre, ovale, dans lequel on s’accorde à reconnaître le Bleu tricolore, retaillé. Le célèbre sortilège a depuis contraint les mains d’un cambrioleur contrit à mettre fin à ses jours : il l’avait enlevé à son père, le diamantaire Wilhelm Fals, qui mourra de chagrin.

La nuit éternelle de certaines victimes inconnues annonce alors les grandes nécrologies du XIXe siècle et la notoriété de leur auteur… Le sang de la famille Hope, qui donne son dernier nom à la pierre, est certainement celui qui fait le plus couler d’encre : les rumeurs racontent que toute la succession héritière du solitaire – sauf le banquier milliardaire Henry Philip, peut-être épargné par la mauvaise fortune – est décédée dans la pauvreté et des morts tragiques.

Dès lors, le « Hope » est le bien de bon nombre de personnalités – dont le Français Jacques Colot, qui se suicide peu après se l’être procuré – et continue de répandre le mal comme autant de légendes. La plus belle d’entre elles le désigne comme coupable idéal d’un naufrage inoubliable quand un quotidien, daté du 19 avril 1912, accuse : « Le fameux diamant bleu, qui porta malheur à tous ceux qui l’ont possédé, et dont La valeur dépasse un million et demi de francs, se trouvait à bord du Titanic. »

Pourtant, le grand bleu n’a pas avalé le diamant : ce dernier honore la gorge de Mademoiselle Landre, danseuse aux Folies-Bergère, à qui un prince russe l’a offert. Faux pas ! Le généreux lui donne la mort peu de temps après.

Le Hope voyage à travers les époques, laissant derrière lui quelques hécatombes… On se souvient d’un orfevre grec qui se tue avec les siens dans un accident d’automobile après avoir vendu la pierre, en 1909, au cruel « Sultan Rouge » Abdulhamid II ; ce dernier, trois mois après son acquisition, est chassé du trône par l’armée. En 1911, Evelyn McLean achète la gemme au joaillier Pierre Cartier. Et bien qu’elle fasse bénir le Hope par Monseigneur Russel, les grondements de l’orage ne présagent rien de bon pendant la cérémonie : l’anathème endeuille la fille du chercheur d’or jusqu’en 1946 – un à un, son fils, son mari puis sa fille disparaissent – avant qu’elle ne s’éteigne elle-même. Son ami Harry Winston verse quelques larmes et une somme d’argent pour récupérer toutes ses parures ; en 1958, probablement pour conjurer la foudroyante promesse de Shiva, le bijoutier fait don du « Blue Hope Diamond » au Smithsonian Institute de Washington…

La pierre, parmi les cinq plus précieuses au monde, repose ainsi dans un écrin de sûreté depuis bientôt quarante-cinq ans sans avoir jeter son dévolu sur la destinée d’un visiteur.
Les envoûtants et ténébreux mystères du diamant se seraient-ils tous cristallisés ?

Mickaël Pagano

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